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Le plus de la rédaction :
Bozusë ;
Kat…: Je pense à lui. Il est/était de ma tribu. Il est parti dans l’autre monde la semaine dernière (Voilà pourquoi les deux temps de la conjugaison.) Kat… n’était pas vieux, je suis même sûr qu’il n’avait pas la demi siècle. Toujours dans le mouv comme on dit. Le mouv; c’est le chantier jusqu’aux heures de convenance. Mais après, ce n’était pas à la maison de suite. Il faut rester encore avec les collègues de chantier ou bien aller chez la famille proche, pour prendre un verre, se passer la tige jusqu’au bout de la nuit. Le matin, on se débarbouille avec encore dans la bouche les relents de victuaille de la veille. On se parfume alors pour être de bon pied dans la journée. Faux. On ne l’est pas. On feint d’être en forme comme les autres. Le frère entrepreneur est content. Tout le monde est content. Le disque dur cérébral tourne sans arrêt et à vitesse grand V. À la fin, il craque. ‘Craque’ veut dire que le cœur explose. C’est la fin et la tristesse comme lot gagnant pour toute la famille.
Combien de jeunes sont à l’exemple de Kat… ? Le sommeil réclame toujours sa part chez tous les êtres animés. Quand on ne récupère pas de l’effort entrepris, le sommeil nous saisit au dépourvu mais … pour le repos sans fin. Et on s’étonne. Or, il n’y a pas à s’étonner. Faut travailler pour vivre. Le sommeil nous manque, je vous jure. Prenez du temps pour la récup. Dormir. C’est aussi ça le défi des hommes.
Il existe dans le petit journal du collège une rubrique Dans la petite voiture de Maselo où je mets en scène un taximan qui véhicule des parents de la région VKP pour se rendre au collège de Tiéta. Je vous livre un aperçu. Petit rappel:ce journal du collège existe depuis 2008. Il sort tous les jeudis scolaires. Je ne l’ai pas encore lancé cette année. D’ici peu, on va le faire. Hmajan! Comme s’exclame Mme Hmaloko P.
Dans la petite voiture de Maselo (Vetchaong 17.00)
- Finies les vacances, le travail a repris depuis plus de deux semaines. Et vous savez Mme Ginette, on ne va même pas sentir l’année filer.
- Vous avez raison, ça va être comme 2016. Faut dire que c’est plutôt bien Mr Maselo. Bien, pourquoi ? Je ne sais pas. Personnellement, je ne veux pas que l’année meure ainsi. On n’a même pas eu le temps de marier le neveu de la famille. Tout était prêt mais au dernier moment, je ne sais pas comment l’autre neveu, celui qui devait assurer la coutume, était tombé malade. Il avait été évacué sur l’Australie. Peu de temps après, il était parti. Moi, je n’étais même pas au courant. Myriam, ma nièce, c’est elle qui m’a annoncé la nouvelle. Et comment, Mr Maselo ? Par la France.
- Ha !
- J’étais à Koné pour une affaire au palais de justice, une cousine très éloignée qui faisait du fb dans le parking, était venue pour m’annoncer la nouvelle alors que personne n’était encore au courant dans la famille. L’info arrivait de la Métropole.
- Oh ! Mme Ginette avec Internet, le monde est à portée de main.
- Mais aussi sens dessus/dessous ! Je vous jure.
- Quand j’ai appelé mon frère qui était à Vavouto, il n’était même pas au courant alors que toute la tribu le savait.
- Les nouvelles comme ça, ça va vite ! Et même très vite !
- En effet et même M. Maselo, on a l’impression qu’une partie de notre vie nous échappe. Elle nous file entre les mains. Marie Aimée !
Jessie C: Je vous livrerai sa réaction au numéro de Nuelasin 79 dans une prochaine édition. Elle écrivait qu’elle sortait d’une convalescence covid. Elle reprenait son travail mais qu’elle n’avait pas trop la forme. En lisant mes écrits, elle prit son courage à deux mains et elle repartit à je ne sais combien de tours/minute. Et moi qui pensais que je n’écrivais que des bêtises ou alors pour moi-même. Par cet encarté, je remercie Mme Jessie qui par sa réaction me donne une raison à mon écriture. Une bonne. Et oui; si ça se trouve, il y a aussi d’autres raisons. Des mauvaises. Sûr, que Elisa est en train de prier son totem pour me quitter, à cause de mes conneries scripturales; n’est-ce pas Sœur Marie Tamole ? Wanamatra! Moi mort.
« Mesdames, je vous aime »: Mardi, au collège de Tiéta, nous avons comme les citoyens du monde rendu hommage à la Femme. Et l’histoire de Mme Rosa Parks m’est venue machinalement à l’esprit. Une femme qui en voulant rester assise, a mis debout tout un peuple et même a fait honneur à l’humanité entière, en abattant le système ségrégationniste de son pays, l’apartheid. « En 1955 dans une Amérique déchirée par la ségrégation raciale, Rosa Parks refuse de céder sa place à un passager blanc dans un bus de Montgomery (Alabama). Arrêtée par la police et condamnée à une amende, elle fait appel de son jugement et devient l’égérie d’un mouvement national de défense de droits civiques. »
Il y a dans le monde d’autres femmes comme elle. Je ne les cite pas. Mais… au CDT, il y a Mme Bernadette qui, pour rendre hommage au combat des femmes, a organisé, bien sûr avec le concours des autres collègues du même genre, un petit buffet que nous, personnel enseignant avons partagé dans le hall de notre nouveau bâtiment.
Aux filles, futures responsables et mamans de ce pays, il a été demandé de s’habiller en robe popinée. Elles étaient venues le jour tout en couleur de l’arc-en-ciel. Elles étaient éclatantes, je vous jure. Nous n’avons pas arrêté de nous prendre en photo dans la cour mais aussi devant un grand panneau, un drap teinté en bleu ciel sur lequel sont épinglées des fiches/pensées des élèves au sujet des combats de la femme. Vous avez dû vous en rendre compte par vous-même en allant sur les réseaux sociaux.
Pour vous lectrices et lecteurs de Nuelasin, je propose ce petit texte produit un peu pour m’exorciser. La semaine d’avant, c’était la disparition d’un neveu dans la grande forêt de Hunöj. Il fut retrouvé. Grands Dieux ! Samedi dernier c’était le départ de l’autre neveu, Kat…, vers l’autre monde. Toute la semaine depuis lundi, c’était l’offrande de la nouvelle igname. Combien en donnera-t-on pour conjurer le sort ?
Bonne lecture à vous de la vallée. Wws
Simelem ne trouvait pas le sommeil à l’instar de tous les jeunes de Hunöj. Ils en avaient grand besoin ces jours-ci de fin d’année. Pendant la nuit, plusieurs d’entre eux avaient dormi dans la grande forêt. La tribu avait encore livré bataille pour extraire cette fois à la forêt un européen qui s’était perdu. Trop dire. Mr Blanc a juste garé sa voiture à côté de la pépinière, petite entreprise tribale. Il a marché en direction de la forêt et fasciné par les variétés d’arbres et par la densité végétale, il a épousé leur esprit et disparu. Mais les gens de la tribu disaient assez juste que sa tête avait été tournée par les deux filles et qu’il n’avait pas eu le réflexe de retourner sa veste. Avant que son téléphone ne se vide complètement de sa batterie, il eut la sincérité d’esprit d’indiquer son positionnement à la gendarmerie de Wé: « Mr Blanc, prof d’EPS au collège publique de Wé, suis parti me promener dans une grande forêt du plateau. J’ai garé ma voiture à côté d’une pépini... tuut…tuut… » Les gendarmes sont allés donner l’information aux employés municipaux. L’un a appelé l’annexe de Mou. Un homme de Hunöj y travaillant, Wapata eut le réflexe d’appeler le responsable de la pépinière qui partit voir pour confirmer la présence de la voiture du monsieur. L’annexe de la commune à Mou appela après la gendarmerie. Et les gens de Hunöj lancèrent les recherches. Le petit chef fut averti et immédiatement les équipes de secours furent organisées. Pendant que la populace entrait dans les brousses ; Wapata et le petit-chef se rendaient chez Waigojeny, le sorcier qui habitait Hmelek, la tribu voisine : « Sa voiture n’est pas garée très loin du grand banian. Les clefs sont dessus. Mais vous ne pourrez pas l’ouvrir. Quand le soleil touchera le sommet du sapin à pic et qu’il n’y aura plus de chant d’oiseaux, appelle-le. De la voiture il entendra. Appelle-le non par son prénom mais par Atr. Il répondra et il viendra normalement. Ne l’effraie pas comme un oiseau de proie et surtout ne lui parle pas avant que vous lui flanquiez les trois cœurs de hmacatresi sur le visage. Je vais vous les donner. Une, deux, trois. Vous allez voir, c’est comme s’il sortait de son sommeil. Après, c’est bon. Il reprendra sa voiture pour partir comme s’il avait fini sa promenade. De toute façon, il ne sait pas ce qui s’était passé. Il aura seulement le souvenir d’avoir fait la rencontre de deux femmes. Une noire et une blanche. Une des deux parle sa langue et l’autre pratique une étrange langue mais qu’il semble arrivé à comprendre. Le reste ne lui reviendra pas avant longtemps. Même qu’il a le temps de tout oublier. Voilà, je pense vous avoir tout dit. Surtout, respectez les consignes et éloignez-vous du véhicule. » Le sorcier a parlé et donné les feuilles de la plante vertueuse. Wapata et le petit-chef repartirent vers les champs à l’endroit où Mr Blanc a garé sa voiture. Les gendarmes étaient déjà sur place avec d’autres jeunes de la tribu qui étaient ressortis de la grande forêt.
Vers midi, le portable de Simelem sonna : « C’est oncle Wapata. T’es où ? » « A Hnaköj. »
- Retourne à la grande route et rejoins-nous à Jien.
- Tonton mais y a d’autres jeunes qui sont encore un peu partout dans la forêt ; je les entends.
- Dis-leur de se joindre à toi et de revenir vers la voiture. Céb !
Il raccrocha.